« Un comptable doit aussi être un psychologue »
Britt Simon
Elle aurait certes voulu être architecte ou psychologue pour animaux, mais Britt Simon a fini par étudier la comptabilité, après s’être essayée à la psychologie. « Cette tentative en psychologie n’a pas été un grand succès », admet-elle, « bien que je sois aujourd’hui autant psychologue que comptable pour certains clients ».
Britt est administratrice de l’antenne AL de Courtrai depuis septembre 2019. Après avoir décroché son diplôme, elle a d’abord rejoint un grand bureau d’assurances où elle « avait peu de travail, pouvait discuter beaucoup autour de la machine à café et repartait chez elle à 16 heures précises ». Et même si le café était savoureux, elle se sentait bien trop jeune pour se résigner à un tel ennui.
« Avant de rejoindre finalement Accountantsburo Lauwers, j’ai vu le paysage des fiduciaires profondément évoluer pendant 18 ans, dans deux bureaux », se rappelle-t-elle. « À l’origine, mon travail se limitait à un rôle d’exécutante et je me chargeais simplement des aspects imposés par la législation. En tant que jeune gestionnaire de dossiers, ces tâches me demandaient beaucoup de travail, alors qu’elles sont aujourd’hui en grande partie automatisées grâce à la numérisation. Cela nous permet de passer plus de temps à interpréter les chiffres et à donner aux clients des conseils plus concrets et plus précieux. En 20 ans, le monde a complètement changé et je ne peux que m’en réjouir. »
Vos clients s’en réjouissent-ils aussi ?
« J’ai la chance d’avoir de grandes entreprises dans mon portefeuille. Elles perçoivent clairement les avantages du traitement numérique de leurs données comptables. L’époque des boîtes à chaussures bourrées d’enveloppes souvent non ouvertes est révolue pour elles, même s’il y a encore quelques exceptions. Elles ont d’ailleurs été les premières à demander le déploiement complet du reporting numérique, car il leur permet d’obtenir à tout moment des informations précises et actualisées sur la santé et les possibilités de leur entreprise. »
À quoi ressemble votre journée de travail ?
« Elle se passe à la fois chez le client et au bureau. Je me rends fréquemment sur place pour assister le comptable interne, qui se contente souvent d’un rôle d’exécutant. Je traite alors des questions qui requièrent des connaissances plus spécialisées, comme la préparation d’une demande de crédit. Les comptables internes n’ont généralement pas le temps de se tenir au courant de la législation récente par le biais de formations. Or, énormément de choses ont changé ces dernières années, surtout en matière de fiscalité. J’encadre, en outre, l’équipe de Courtrai et je suis le planning des dossiers qui nécessitent une attention particulière. »
Parfois, Il n’est plus question de chiffres, mais d’expériences et de visions de la vie et des motivations qui font que les gens déplacent des montagnes ... ou se sentent empêchés de le faire.
Vous êtes donc plus une consultante qu’une comptable ?
« Pour les grandes entreprises, certainement. Dans le passé, les entreprises voulaient surtout satisfaire à leurs obligations légales. Leurs chiffres n’étaient souvent débattus qu’une fois par an, et encore, souvent tardivement après la clôture de l’exercice. Aujourd’hui, elles attendent à juste titre une évaluation plus permanente et des conseils proactifs. Seules les petites structures nous considèrent encore trop souvent comme un simple poste de coût. Il leur faut un peu plus de temps pour percevoir les avantages de nos conseils. »
« À cet égard, je suis également convaincue que nous irons beaucoup plus loin à l’avenir. L’IA aura un impact dans notre secteur aussi. Si nous devons aujourd’hui encore examiner nous-mêmes pour quel dossier quel conseil spécifique pourrait être applicable, un algorithme sera bientôt en mesure d’effectuer une sélection beaucoup plus fine. Les ordinateurs sont, en effet, bien plus performants en matière de monitoring, ce qui nous donne davantage de possibilités de mettre notre expertise au service des clients. »
Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans votre travail ?
« La comptabilité est une question de confiance. Pour de nombreux entrepreneurs, le comptable est le partenaire avec lequel ils peuvent évoquer leurs affaires. L’entrepreneuriat ne se limite toutefois pas à des décisions et de procédures commerciales isolées. Le tempérament de l’entrepreneur ainsi que ses motivations, ses intérêts et ses freins privés et familiaux jouent un rôle au moins aussi important. Je trouve ce facteur absolument fascinant. Il arrive régulièrement dans les entreprises familiales que nous devions jouer un rôle de conciliateur ou de médiateur. Le fait que j’aie voulu faire des études de psychologie ne doit finalement rien au hasard. En tant que comptable, je suis souvent aussi une psychologue. »
« En fait, je suis convaincue que plus nous connaissons les personnes qui font vivre une entreprise, mieux nous pouvons les conseiller. Entreprendre est, en effet, intrinsèquement lié à la vie. En tant que comptable, vous percevez en permanence les motivations des gens. Et ce n’est que dans un climat de pleine confiance qu’ils les aborderont. Il n’est alors soudain plus question de chiffres, mais d’expériences et de visions de la vie et des motivations qui font que les gens déplacent des montagnes... ou se sentent empêchés de le faire. »
Complétez brièvement : « Sans comptable, ... »
« ... l’entrepreneur n’aurait plus de boussole. Nos conseils se fondent sur des chiffres et nous pouvons donner aux entrepreneurs en difficulté des pistes concrètes qui leur permettent d’aller de l’avant. Mais l’inverse se vérifie aussi : nous devons parfois les ramener sur terre. Certains surestiment leurs capacités et pourraient prendre des décisions qui les mettraient en difficulté pour le reste de leur vie. Certes, je suis la première à reconnaître que les comptables sont parfois trop prudents. Disons que nous devons trouver le meilleur équilibre en dialoguant avec le client. »
Qu’est-ce qui rend votre journée de travail agréable ?
« Pouvoir rendre visite aux clients et les aider à optimiser ou à résoudre un problème concret. Il en va de même pour les collègues, d’ailleurs. »
Qu’est-ce qui pourrait gâcher votre journée ?
« La monotonie. Cela peut paraître étrange, mais l’administration n’est pas vraiment ma tasse de thé. »
Faites-vous beaucoup de sport ?
« Mon travail m’amène à être souvent assise. Je compense donc en faisant du sport trois à quatre fois par semaine : course à pied, tennis, paddle et natation. J’aime assez cette variété. »
Comment vous détendez-vous ?
« Je me vide la tête en faisant du sport. Chaque jour, je m’offre une petite séance de yoga, en me concentrant sur la respiration. J’aime aussi être dans la nature, les longues promenades, les sorties à vélo et, bien sûr, une terrasse de temps en temps.... Le bonheur ! »
Que rêviez-vous de devenir quand vous étiez enfant ?
« Psychologue pour animaux. J’ai longtemps été végétarienne et j’avais beaucoup de sympathie pour les animaux : ceci explique cela... Je réalise maintenant que j’aurais aimé être architecte. »
De quelle habitude voulez-vous vous débarrasser ?
« Mon impatience. Je dois parfois faire de gros efforts face à de longs discours de mes interlocuteurs. Je remarque cependant que cela s’améliore avec l’âge. »
Quel est le pire job que vous pouvez imaginer ?
« Un job sans autonomie. Je n’aime pas les choses figées et régies par mille règles. Mon premier employeur était quelqu’un qui ne tolérait qu’une ligne : la sienne. De tels employeurs ne peuvent plus gagner la bataille face à d’autres sur un marché du travail en pénurie, même s’ils paient peut-être un peu mieux. »